Le rapport d’une étude de l’Institut de Recherche en Droits Humains (IRDH) signale l’incursion du vendredi 11 octobre à Lubumbashi, Chef-lieu du Haut-Katanga serait l’œuvre de Gédéon Kyungu. Ces actes d’atteinte à la paix et la sécurité de la province du Haut-Katanga ne peuvent qu’être une connivence avec des personnalités politiques et militaires qui agiraient, en fonction des dividendes à tirer des dynamiques politiques nationales et provinciales.
La province du Haut-Katanga est la mieux nantie de la République Démocratique du Congo. Elle possède plus de moyens humains, logistiques, techniques et financiers pour ses services d’intelligence, que toutes les autres provinces. Alors, comment expliquer ce paradoxe sécuritaire ? C’est en ces termes que s’interroge l’IRDH au sujet des incursions à répétition des miliciens, dans la ville de Lubumbashi.
A cet effet, le rapport recommande au nouveau Gouverneur du Haut-Katanga, par l’entremise du Ministère de l’Intérieur, solliciter l’appui du Gouvernement central, afin de renouveler les animateurs des services de renseignements militaires en province (DEMIAP). Cela, en plus de la deuxième zone de défense, afin de permettre à la Justice militaire d’approfondir les investigations judiciaires sur les responsabilités pénales individuelles et des chefs hiérarchiques de ces incursions récurrentes.
Les organisations des droits de l’Homme et autres organismes de la société civile devraient approfondir la recherche et la documentation desdites incursions sanglantes à répétition.
Le Mouvement des Indépendantistes et Révolutionnaires Africaines (MIRA) dont Gédéon Kyungu est numéro un, devrait collaborer avec les nouveaux animateurs de l’Etat, en mettant en leur disposition des informations pouvant lever l’équivoque sur l’accusation d’atteinte à la paix et la sécurité dans le Haut-Katanga.
Thèse
Le présent rapport exclut les deux théories d’innocence et de manipulation du chef du Mouvement MIRA. Car, Kyungu Gédéon est le seul commandant des troupes dont il a la connaissance d’effectifs et positionnement en brousse. Il a la latitude de leur donner des ordres, à distance, et ils les exécutent. Selon les experts de l’IRDH, il les a invités, le 11 octobre 2019, à une fête d’anniversaire et ils sont venus, au risque de leurs vies.
En sa qualité de chef du mouvement politique MIRA, Kyungu Gédéon sait qu’il n’y a jamais eu de cadeau dans ce domaine. Par ailleurs, comme, il nourrit l’ambition légitime personnelle de conquérir et exercer le pouvoir public. Il caresse l’idée de présenter des candidats et gagner des sièges aux législatives nationales et provinciales, en 2023. C’est pour ces motifs qu’il a fait de MIRA, une organisation politique structurée, avec une répartition de tâches claires. Son porte-parole contacte différentes autorités nationales et locales et donnent des interviews aux journalistes, sur la situation de MIRA.
A ses deux titres de commandant des troupes et chef politique, Gédéon Kyungu ne peut prétendre ni être innocent des actes que poseraient ses miliciens ou son groupe politique, ni être manipulé par une autre personnalité politique.
Ainsi, ne reste-t-il que la thèse de connivence avec d’autres personnalités politiques du pays dont la thèse reste difficile à confirmer.
Personnalités citées, ou ayant manqué au devoir d’agir, Il revient que des groupes armés, se réclamant de MIRA, utilisent la même et unique route, celle des communes Annexe et Ruashi, toutes les fois qu’ils attaquent la ville de Lubumbashi.
Pour les experts de l’IRDH, les FARDC et la PNC réagissent toujours de la même façon, c’est-à-dire qu’elles paraissent être surprises et réagissent en tuant quelques miliciens, laissant d’autres s’échapper dans la nature. Une façon de mener des opérations qui pousse des personnes interviewées à citer ou accuser de connivence, des personnalités civiles et militaires, tels qu’un ancien Gouverneur de la Province du Katanga, du fait d’avoir le pouvoir et le devoir de mettre fin aux incursions, avoir la bonne connaissance du dossier de Gédéon Kyungu et des autres groupes armés du Haut-Katanga et d’avoir été activement impliqué à la création des FAP.
Rappel des faits
Issue du groupe des pygmées, Kyungu Mutanga Gédéon est né le 10 octobre 1968. Il est originaire du village de Kabala, chefferie de Nyembo wa Nkunda, dans le territoire de Manono. Diplômé d’études secondaires de pédagogie, il a été un enseignant de géographie et histoire, avant de rejoindre les Forces d’Autodéfense Populaire (FAP), en 2000. Kyungu Gédéon était nommé Commandant de brigade des FAP, dans les chefferies de Museka et Mulongo, par le « Général » Makabe Kasongo Ngwele. En 2003, il décida de s’établir à son propre compte, sur le mont KIBAWA, dans le Parc Kundelungu, l’axe Moba-PwetoMitwaba, connu sous le nom du « Triangle de la Mort ».
Afin de contrer la traversée du Fleuve Congo des troupes de l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) qui soutenaient le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD-GOMA), dit l’IRDH, le Président Laurent-Désiré Kabila avait ordonné la distribution de plus de 35.000 armes AK47, UZZI et FALL, aux Forces d’Autodéfense Populaire (FAP), à la rive ouest du fleuve Congo, dans les territoires d’Ankoro, Malemba-Nkulu, Mulongo et Bukama.
Les FAP étaient sous la conduite de Monsieur Kabila Dieudonné, petit frère du Président Laurent-Désiré Kabila. En 2000, le Vice-Gouverneur instaura les FAP du Nord-Katanga, sous commandement successif de Kambala, Mwamba wa Ilunga et Makabe. Les autres chefs de guerre étaient, notamment : Kabale, Mangi, Chinja-Chinja, Mukalay (deux mètre), Bakanda Bakoka et Mvwende.
Pour l’IRDH, Gédéon Kyungu avait trois motifs personnels de quitter les FAP. Il s’agit du viol de sa femme par son chef; l’injustice dont il serait victime de celui qui détournerait des fonds de démobilisation et réinsertion sociale des FAP au seul bénéfice de MAKABE et sa famille; le fait d’arracher régulièrement l’or et le coltan aux siens (pygmées) par des proches du Gouverneur incriminé (bantous).
Avec le temps, les revendications du groupe de Kyungu à l’endroit de l’Etat congolais, avaient pris la forme de l’exigence de participer à la gestion politique de l’Etat. Il sied de citer l’intégration des FARDC, la reconnaissance des grades de ses hommes et la récompense des guerres menées contre le RCD.
Afin d’atteindre ces trois derniers objectifs, le groupe de Gédéon commença à s’attaquer aux villageois et créa le « triangle de la mort ». En 2004, il s’empara d’une grande quantité d’armes et munitions des Forces armées congolaises (FAC), à Kimpamba.
Le 24 avril 2004, le Gouvernement avait procédé à la Démobilisation, Désarmement et Réinsertion (DDR) des groupes armés du Nord-Katanga. Le porte-parole de Kyungu dit que le groupe avait immédiatement obtempéré. Cependant, à son arrivée à Lubumbashi, en 2006, il avait été mis en résidence surveillée, au mess des officiers FARDC. A sa place et celle des cadres de leur mouvement, d’autres politiciens, à l’instar du Dr Kisula Ngoy Urbain s’étaient fait élire.
en 2009, Kyungu Gédéon a été poursuivi devant la Justice militaire, jugé, condamné et envoyé en prison, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre.
A la veille des élections, le 11 octobre 2016, Kyungu est solennellement accueilli, avec fanfares et champagnes, par le Gouverneur de l’époque, devant un public amassé au Bâtiment du 30 juin, siège de l’Assemblée provinciale. Depuis cette date, il est logé dans une villa du Quartier Golf et nourri par la République. Le 11 juillet 2019, une soixantaine de miliciens de Ba Kata Katanga, munis d’armes à feu, réclamant la sécession du Katanga, avaient attaqué les quartiers Kalebuka et Kamasaka, Commune Annexe. La riposte de l’armée avait causé une dizaine de morts, du côté des miliciens.
Judith Asina
Avez-vous aimé l'article? Partagez et Laissez votre commentaire