Une délégation du Programme Alimentaire Mondial (PAM) accompagnée des journalistes s’était rendue du 25 juin au 5 juillet dans le Tanganyika et au Nord-Kivu, deux provinces situées dans la partie Est de la République démocratique du Congo. Objectif ? Passer au peigne fin les réalisations de cette agence des Nations unies en faveur des déplacés des conflits intercommunautaires opposant les Ntwa aux bantous dans le Tanganyika ainsi que le Projet d’appui aux chaines de valeur des petits producteurs agricoles (P4P) au Nord-Kivu.
De Kalemie, chef-lieu du Tanganyika, en passant par Kabalo, Nyunzu, Goma et Rutshuru, ainsi que différentes localités qui l’ entourent, il a été constaté que le PAM fait un travail de titan avec soit une assistance alimentaire ou la cohésion sociale et un appui remarquable dans la lutte contre la malnutrition dans le cadre de P4P.
L’appui aux déplacés…
Quinze sites abritent les déplacés des conflits intercommunautaires à Kalemie. Il s’agit de sites de Mukulu ainsi que Katanika I et II que la délégation a visité. Ces déplacés ont tous encouragé l’assistance apportée par le PAM en leur faveur. Ladite assistance concerne la farine de maïs, du sel iodé, les haricots et de l’huile végétale, au-delà d’une somme de 120.000 dollars pour l’achat de provision. Mais les besoins étant énormes, ils auraient voulu que le PAM régularise cette assistance pour éviter une rupture d’alimentation surtout pour les enfants.
D’autres, par contre, ne jurent que par leur retour dans leurs milieux d’origine pour renouer leurs activités habituelles. Chose que le PAM a encouragé.
P4P en action
Le Programme d’Appui aux Chaines de valeur des petits producteurs a été initié conjointement par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et l’agence des Nations unies pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO). L’idée consiste à renforcer la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des bénéficiaires, ainsi que promouvoir la cohésion sociale, l’égalité entre le sexe, la paix et la réconciliation.
A Kasinge, un village situé à 36 kilomètres de Kabalo, le Chef y est revenu juste depuis cinq jours, au passage de l’équipe. Cela, après avoir fui le conflit intercommunautaire qui opposait les Ntwa aux bantous. Le Chef Kasinge en a profité pour faire un plaidoyer pour l’intérêt du village et des villageois. Il a vivement souhaité la paix et la réhabilitation de la route qui mène à son village.
Il a fait part à la délégation du PAM des difficultés de sa communauté, notamment du sel, des médicaments et une maternité. « Allez à l’hôpital, vous verrez comment les femmes accouchent à même le sol », déplore le chef Kasinge. Pour couronner le tout, il demande la reconstruction du village qui est quasiment déserté par les déplacés.
Lutte contre l’insuffisance alimentaire
Vu l’urgence qui se présente suite aux cas de malnutrition élevés, le PAM a dû se déployer. Ce qui fait que dans le village de Monde, à 19 Kilomètres de Kabalo, le PAM octroie la carte SCOPE. Cela, en vue d’identifier les bénéficiaires de l’assistance. Sur place, la délégation a constaté l’afflux de cette population pour l’identification. Car, selon Jean Banza Mukalay, secrétaire du Chef de cette entité, il y a amélioration par rapport à la situation initiale. Allusion faite à l’alphabétisation en faveur des femmes et que la majorité se livre désormais aux Activités Génératrices de Revenus (AGR) à travers l’agriculture.
C’est de la même manière que la délégation a assisté à une séance d’enseignement aux femmes en matière d’alphabétisation à l’Institut Shabana, situé au quartier Lukundula sur le long de l’avenue Sendwe, à côté de la paroisse Saint Miche de Kabalo. Un aspect qui répond au domaine d’égalité entre sexe et autonomisation des femmes. Ici, le cours se donne de manière à ce que neuf mois après, elles soient en mesure d’entamer des Activités Génératrices de Revenus (AGR) pour l’intérêt de leurs familles en particulier et de la communauté en général.
Ce qui enchante ces femmes dont la plupart remercient le projet qui leur apprend à lire et écrire : ‘’Je remercie le projet puisqu’au début, je ne savais ni lire, ni écrire. Maintenant, j’arrive à dialoguer avec mon mari, chose qui ne se faisait pas. Seulement, je demande l’apprentissage du français’’, affirme Sepho-rose Katende wa Katende, une apprenante.
L’intervention du PAM est allée dans le sens d’interpeller ces femmes sur le fait qu’elles sont actrices de développement. Valériane Ndena, chargée du projet P4P a invité les unes et les autres à apprendre pour arriver à assumer leurs responsabilités.
A l’issue de cette formation, Mme Kyungu Bahati, la trentaine révolue s’est distinguée avec un restaurant qu’elle tient dans le village de Katutu, situé à 19 kilomètres de Kabalo. Dénommé Tuendelle (avançons en swahili), cette activités lui permet de prendre en charge une vingtaine de personnes, parmi lesquelles ses six enfants, depuis que son mari a décidé de la quitter. Elle recommande à cette agence onusienne de continuer à les accompagner avec les cours de français.
Soutien aux clubs Dimitra
Se procurer les légumes est un casse-tête pendant la saison sèche à Kabalo. Pour relever ces défis, le PAM et le FAO accompagnent les Organisations Paysannes (OP) à se mettre en groupe pour faire des champs maraichers. Et ce, dans le cadre du Projet d’appui aux chaînes de valeur des petits producteurs agricoles (P4P) avec notamment comme objectifs, le renforcement de la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des bénéficiaires.
Dorcas Neema, 25 ans d’âge et mère de trois enfants du club Dimitra du quartier Tshanga Tshanga explique : ‘’ C’est difficile de trouver des légumes à Kabalo pendant la saison sèche. Raisons pour laquelle nous nous sommes organisés en trois clubs Dimitra et à trente, on a planté les amarantes, tomates, oignons, choux et ciboules. Pour ce travail, nous n’avons pas des intrants, alors qu’il est prévu 150 plates-bandes mais nous n’en avons que deux arrosoirs. Il nous manque également des houes’’.
Non loin de là, au quartier Lumbu Lumbi, la structure de ZEBREAU accompagne techniquement un autre club Dimitra. Séraphine Ngoyi, l’animatrice de cette structure a précisé que personne n’a donné les semences, mais les agriculteurs ont été sensibilisés pour se mettre en groupe, faire une cotisation en vue de trouver un terrain d’opération.
Deux Organisations Paysannes (OP) opèrent sur ce lieu. Et depuis le mois d’octobre 2017 que le travail a commencé, la récolte des arachides et des niébés a été réalisée à deux reprises. Elle affirme que ce projet rapporte plus, étant donné qu’une nouvelle approche n’existait pas.
Jardin-école à Nyunzu
Kapulo est une localité située à 1,5 kilomètre de Nyunzu centre. Ce village de Mulongo-Mupemba est constitué d’une communauté rurale occupée en majorité par les Ntwas. Ici, trois Organisations Paysannes (OP), c’est à dire Mapendo, Tujitegemeye, Muungano sont à l’œuvre dans un jardin potager dans le cadre de l’éducation nutritionnelle. Avec le PAM, il a été mis en place un projet de jardin-école où on y trouve le maïs, arachides, choux, aubergines, amarantes et niébés.
Amina Aishe Kagalugalu, mère de sept enfants qui fait partie de cette équipe de 30 personnes avec 20 femmes, a reconnu la contribution du PAM ainsi que la FAO dans la mise en œuvre de ce projet qui a commencé par l’alphabétisation des femmes. Ce champ, dit-elle, aide à surmonter le village pendant surtout la saison sèche période où il est difficile de trouver des légumes. Elle sollicite tout de même plus d’outil de travail, notamment la semence, les houes, machettes ainsi que des bottes. A part ça, elle demande un bouquet de protection, c’est-à-dire de la nourriture devant couvrir le moment de travail.
De l’autre côté, c’est le quartier Kamituga à 500 mètres de Nyunzu-centre où la population est bantoue. Toujours dans le cadre des jardins-écoles, il se cultive les niébés, amarantes, gombo, choux en vue de subvenir aux difficultés des familles.
Marco Mbuyu Mashaka révèle que l’équipe a déjà récolté une quantité des produits qui lui ont permis de placer la somme de 50.000 CDF dans une caisse. Ladite somme, rassure-t-il, aidera à travailler la saison prochaine. Mais, toujours est-il que les difficultés sont dues aux semences insuffisantes puisque que lorsque le projet est arrivé, il y avait un conflit intercommunautaire entre les Ntwas et bantous qui a créé l’insécurité alimentaire et la population a consommé une partie de semence et planté moins. De ce fait, il remercie ceux qui les assistent directement, le PAM et la FAO. ‘’Nous sommes content qu’une délégation soit venue de loin nous visite. Une chose qui nous encourage à continuer dans nos entreprises et nous ferons en sorte de continuer à planter pour récolter un peu plus’’, rassure-t-il.
Entrepôts de Nyunzu
Le PAM a constaté selon des investigations que la population du territoire de Nyunzu était en insécurité alimentaire à 99 %. Raison pour laquelle la distribution des vivres est en cours depuis le 16 août 2018, en faveur d’environ 40.000 ménages pour 200.000 personnes. Ils sont en train d’enregistrer les bénéficiaires. Les entrepôts sont gérés par le grand bureau de Kalemie.
Pour Josué Imani, gestionnaire de stock du PAM a indiqué qu’il y a différents commodité des vivres, notamment les légumineuses, la farine de maïs, l’huile végétale, sel iodé. Les produits distribués viennent de plusieurs entrées parmi lesquelles les achats locaux, régionaux et internationaux. Seulement, le PAM privilégie l’achat des productions locales. C’est en cas d’insuffisance de stock qu’un appel d’offre est lancé pour se ressourcer ailleurs. Dans l’entrepôt, la sortie de fait suivant la méthode Fifo (First In First Out, c’est-à-dire première entrée, première sortie en anglais).
Léon Bagula, point focal de distribution générale des vivres au bureau PAM/Kalemie a pour tâche de planifier les vivres sur une période donnée. Il relève la difficulté liée surtout au problème de rupture de stock. Il affirme que l’opération de distribution se fait en collaboration avec les autorités en place pour sensibiliser les bénéficiaires et éviter que les produits soient mis en vente. Si non, la vente n’est pas interdite puisque les bénéficiaires font face à plusieurs besoins.
Le Gouvernement canadien à Rutshuru
La population de Rutshuru fait aux problèmes des guerres et conflits interethniques ainsi que des perturbations climatiques. Pour en découdre, le Gouvernement du Canada a accepté de l’appuyer en vue d’améliorer la résilience à travers le projet P4P. Ce financement de cinq ans, qui a commencé en 2017 jusqu’en 2021, concerne 12.500 ménages, des petits producteurs agricoles avec quatre volets, notamment l’appui à la production agricole pour que les petits producteurs aient des surplus à commercialiser afin d’augmenter leurs revenus. Le deuxième volet concerne surtout le PAM qui soutient la commercialisation de leurs produits. Surtout qu’il faut aussi arriver à écouler et les encourager à produire plus. L’autre volet a trait à la nutrition, d’après les études, il a été démontré que 50 % de la population souffre de la malnutrition aigüe.
L’Association des Jeunes Cultivateurs et Eleveurs pour le Développement au Kivu (AJCEDKI) bénéficie de ce projet. Rencontré dans son entrepôt, Elias Abimana qui en est coordonnateur a déclaré qu’il collecte tous les produits de différents dépôts qui ont été conçu par le projet. ‘’C’est ici que les producteurs appuyés par le projet rassemblent leurs produits afin de chercher le marché’’, a-t-il précisé. Le premier client c’est le PAM à travers P4P pour approvisionner les cantines scolaires, à part d’autres preneurs de Goma et Bukavu qu’il contacte pour que les producteurs trouvent le marché.
Cependant, la plus grande difficulté est en rapport avec les quantités produites qui augmentent de plus en plus. L’autre défis qui est en voie d’être relevé c’est difficulté c’est en rapport aux producteurs qui ont absolument de toucher l’agent, une fois que les produits arrivent dans l’entrepôt. ‘’Heureusement que pour le moment, il y a une institution bancaire qui est prête à nous aider dans la recherche des petits crédits’’, a-t-il soutenu. Une façon pour lui de remercier le Gouvernement du Canada qui, à travers le PAM et FAO, appuie cette association dans l’amélioration de la condition d’entreposage et la commercialisation.
Judith Asina
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