Elles considèrent que tout transfert d’eau douce en dehors du territoire national vers le territoire d’un autre Etat est soumis à l’accord préalable du peuple Congolais consulté par voie de referendum conformément à l’article 214, alinéa 2, de la Constitution. Ainsi, l’ont-elles décidé, à l’occasion de la 21ème journée internationale d’Action pour les Rivières (JIAR) et 4ème en République Démocratique du Congo « RDC ». Ces organisations relèvent plusieurs conséquences liées au transfèrement des eaux de la rivière Oubangui vers le Lac Tchad, parmi lesquelles les menaces sur la sécurité et la paix en RDC, qui pourra entraver même le processus électoral.
Les Organisations de la Société Civile œuvrant dans le secteur de la gouvernance des ressources naturelles, et des droits socio-économiques et culturels en RDC, se sont réunies autour de la Coalition des Organisations de la Société Civile pour le Suivi des Réformes et de l’Actions Publique (CORAP) pour analyser le contexte sur le niveau de la Gestion des Rivières en RDC.
Pour cette 21ème JIAR, la Société Civile a axé le thème sur « le projet Transaqua », qui consiste au transfèrement des eaux de la rivière Oubangui vers le Lac Tchad. Mais il s’avère que l’idée de ce projet avait déjà été soulevée par les soviétiques depuis les années 1970, à la suite de la grave sècheresse qui sévit au sahel africain et qui avait fait passer la surface du lac Tchad de quelque 22 000 km2 à environ 8 000 Km2 en peu de temps.
Mais aujourd’hui, le débat refait surface à cause de la déclaration d’Abouja, qui porte essentiellement sur l’engagement des chefs d’états membre de la Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT) à concrétiser ledit projet. Ils ont convenu lors de cette Conférence du 26 au 28 février 2018 dernier, dans le cadre de la campagne internationale sur la sauvegarde de ce lac notamment d’approuver le Projet de Transfert des Eaux Interbassins (PTEIB) comme étant un projet du genre partenariat gagnant-gagnant aussi bien pour le bassin du Congo que pour celui du Lac Tchad. Au-delà de cela, il faut mobiliser de ressources techniques et financières nécessaires pour les études et la mise en œuvre du projet.
Inquiétudes de la société civile
La Société Civile Congolaise se pose des questions sur la vraie motivation du projet Transaqua, puisque d’après l’histoire, le système du Lac Tchad a toujours connu des fluctuations plus ou moins importantes. Car les études faites sur ce lac ont démontré entre autres que vers 20000 ans Av. J.-C, le Lac Tchad avait disparu complètement suite à l’aridité des tropiques consécutive à l’apogée de la glaciation. Mais vers 4000 ans (Av. J.-C.), le Lac Tchad avait fini par couvrir une superficie de 1 000 000 km2, soit plusieurs centaines de fois sa superficie actuelle.
Il se fait qu’en 1908, le lac n’était plus qu’un marécage réparti entre deux petits bassins nord et sud, puis son niveau s’était mis progressivement à augmenter. Et en 1963, le lac couvrait une superficie de 22 903 à 25 000 km2.
Cependant en 2008, sa superficie n’était plus que de 2 500 km2. Mais les précipitations semblent avoir repris leur rythme dans la région depuis 2012 et la superficie du Lac Tchad se trouve en phase ascendante. De ce fait, il connait deux cycles naturels, dont l’un des hautes eaux, correspondant à son maximum de superficie et aux nombreuses précipitations dans la région et l’autre de basses eaux, correspondant à la diminution drastique suivie de l’assèchement plus ou moins avancé de son lit. Cet assèchement lui-même est accentué par les multiples et diverses activités anthropiques dans et autour du lac et la mauvaise gestion de tout son bassin versant
Pour les organisations de la société civile, le développement et la gestion des eaux devraient être basés sur une approche participative, impliquant les usagers, les planificateurs et les décideurs à tous les niveaux. Toujours est-il tout acte, accord, convention, ou arrangement qui a pour conséquence de priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout ou partie de leurs propres moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de leurs richesses naturelles, sans préjudice des dispositions internationales sur les crimes économiques, est érigé en infraction de pillage punie par la loi.
Aussi, ces organisations rappellent-elles que le projet Transaqua comporte plusieurs conséquences, tel que démontré à travers les analyses des experts indépendants nationaux, entre autres les menaces sur la sécurité et la paix en RDC, qui pourra entraver même le processus électoral ; la violation des normes internationales et nationales, entre autres le principe de Dublin N°25, la constitution de la RDC dans son article 566, les articles 517 et 538 de Loi n° 15/026 du 31 décembre 2015 relative à l’eau.
Cependant, la diminution importante de débit, ajoutée à la diminution parfois drastique des précipitations observées au cours de certaines années dans l’ensemble du bassin, va entrainer la diminution de la vitesse de l’eau et provoquer l’ensablement du lit du fleuve Congo et plus particulièrement au niveau des barrages hydroélectriques Mobayi mbongo et Inga 1 et 2. En même temps, l’ouverture du bassin du Congo vers le Lac Tchad va entrainer une perturbation des écosystèmes aquatiques, notamment sur le plan zoo géographique. Ce qui va également perturber les deux grandes régions ichtyo géographiques africaines très différentes l’une de l’autre, à savoir la région ichtyo géographique nilo soudanaise (à laquelle appartient le bassin du Lac Tchad) et la région ichtyo géographique du Congo.
Cependant, la réalisation de ce canal engendrerait de nombreux problèmes particulièrement l’hybridation des espèces animales aquatiques, la compétition entre espèces avec toutes ses conséquences. Allusion faite ici à la disparition de certains maillons des chaînes alimentaires non adaptés aux nouvelles conditions de vie créées par la jonction des eaux des deux régions, la disparition de certains habitats, l’apparition, de part et d’autre de nouvelles pathologies jadis limitées à l’une ou l’autre région.
En dépit de cela, le gigantesque canal de prise d’eau va constituer une barrière infranchissable pour les espèces terrestres, qui occasionnera que certains biefs des rivières interceptées situés en aval de la zone de capture verront disparaître leurs chutes ou leurs zones marécageuses ainsi que la faune et la flore qu’elles hébergent. Le gigantesque canal d’eau servira d’importation des pathologies humaines, ce qui, à long terme, va aggraver les problèmes de santé publique en R.D. Congo.
Regret
Les Organisations de la Société Civile congolaise constatent que c’est un particulier qui prend officiellement la position de la RDC dans certaines rencontres, mais à quel qualité et avec quel mandat ? Car la RDC serait représentée par un certain Monsieur François Kalwele, partenaire du ministère de l’Environnement et du développement durable.
Recommandations
Pour remédier à cette situation, elles font plusieurs propositions à tous les niveaux des institutions du pays ainsi qu’à la communauté internationale.
Au Président de la République, il lui est demandé de prendre les dispositions qui s’imposent pour garantir la sécurité et la souveraineté nationale, en tant que garant de la nation. Le Gouvernement quant à lui, devrait définir clairement sa position en se référant à la constitution de la RDC et à la loi n° 15/026 du 31 décembre 2015 relative à l’eau. D’éclairer la population sur son statut de membre observateur de la Commission du Bassin du Lac Tchad et de dire clairement au peuple congolais la cause de sa non-participation à des rencontres organisées par d’autres pays qui touchent la souveraineté de notre pays.
Le Parlement de son côté, devrait insérer à l’ordre du jour de la session de mars la question du Projet Transaqua et d’interpeler le premier ministre par une question oral avec débat sur le projet et la délégation du pouvoir représentatif de la nation à des personnalités n’ayant pas qualité.
La Communauté Internationale pour sa part, est appelé à respecter la souveraineté de l’Etat congolais dans le traitement de ce projet.
La Population doit rester vigilante et de rester debout pour protéger sa mère nourricière qui est le bassin du fleuve Congo et de ne céder à aucunes menaces.
Judith Asina
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