Ce rapport représente l’aboutissement de plusieurs années de recherches sur les pratiques contractuelles et financières de la société minière étatique de la République Démocratique du Congo, la Gécamines, et ses partenaires d’investissement les plus importants.
L’analyse repose sur 200 entretiens, un examen de plus de 100 contrats miniers, au moins 1000 documents d’entreprise, ainsi que sur les rapports de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives couvrant la période 2007-2014.
La première partie détaille comment la Gécamines, l’entreprise étatique responsable de secteur du cuivre au Congo, fonctionne en tant que État parallèle. Cette partie documente comment la Gécamines a pu utiliser sa position privilégiée pour générer 1,1 milliard de dollars US à partir de transactions de cuivre et de cobalt entre 2011 et 2014. Environ deux tiers de ces recettes – soit 750 millions de dollars -ne peuvent pas être retracés de manière fiable dans les registres de l’entreprise. Le rapport tire les principales conclusions suivantes:
Le contrôle des meilleurs permis miniers du pays a permis à la Gécamines d’être le principal gardien des mines les plus convoitées du Congo au cours des deux dernières décennies. Une analyse détaillée des données du Cadastre Minier montre que la société détient encore environ 100 permis d’exploitation, au-delà des limites prévues dans le Code Minier congolais, ce qui permettra vraisemblablement à la Gécamines de conserver ce statut de gardien principal du secteur minier.
Cette position privilégiée a permis à la gécamines de générer des revenus considérables par le biais de ses partenariats, en moyenne 262 millions de dollars US par an en royalties, bonus et autres frais contractuels durant la période 2009-2014. Ces revenus ne sont pas destinés au trésor public et sont largement hors du contrôle public.
Bien que la Gécamines ait affirmé que ces revenus contribueraient à la relance prévue de la production minière, en pratique, ils semblent principalement avoir été utilisés à d’autres fins. Près des deux tiers des 1,1 milliard de dollars auxquels la société avait contractuellement droit entre 2011 et 2014 ne peuvent être retracés de manière fiable dans les registres de la Gécamines. Cela soulève d’importantes questions quant à la destination réelle des revenus de la Gécamines.
Avant les élections de 2006 et de 2011, les transactions par les sociétés minières étatiques se sont accélérées, générant des recettes importantes que se sont avérées difficiles à retracer. Étant donné que le pays se trouve actuellement dans une période au courant de laquelle des élections critiques devraient avoir lieu, les conditions sont réunies pour de nouvelles ventes non déclarées et pour d’éventuels détournements de fonds. Il est troublant que la Gécamines ait refusé de publier des contrats pour plusieurs transactions minières qui pourraient avoir générées plus d’un demi-milliard de dollars en 2016-2017.
Bien que la RDC soit riche en ressources naturelles, ses habitants sont parmi les plus pauvres du monde. Malgré des milliards de dollars d’investissements privés dans le secteur extractif, les bénéfices ont jusqu’ici généré des retombées publiques limitées. Le rapport du Carter Center présente des recommandations visant à améliorer la transparence et la responsabilité de la Gécamines afin que l’entreprise contribue davantage au développement de la RDC et au bien-être du peuple congolais.
« La RDC a le potentiel de surmonter l’héritage de mauvaise gestion et de corruption qui sévit dans ses industries extractives », affirme l’ancien président des Etats-Unis, Jimmy Carter, dans l’avant-propos du rapport. « J’appelle les dirigeants politiques à travailler avec le secteur privé, la société civile, la communauté internationale et d’autres pour assurer une gestion responsable des ressources naturelles de la RDC. »
Dans les semaines à venir, le Centre Carter publiera quatre études de cas dans le cadre d’Affaire d’État, avec une concentration sur certains des projets miniers les plus importants de la RDC. Ces études illustrent de manière plus détaillée les tendances globales du secteur et éclaircissent les décisions et les pratiques qui ont privées la RDC et sa population d’une bonne partie des retombées découlant des contrats de la Gécamines.
Joël imbole
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